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Quelle stratégie immobilière adopter en 2024

20/06/2024 Partager l’article sur

Selon une étude de l’INSEE de 2021, 57,2% des français sont propriétaires de leur logement. Ce chiffre est en dessous de la moyenne européenne (70% des européens sont propriétaires selon Eurostat en 2021).

Selon cette même étude de l’INSEE, 24% des français possèdent au moins deux biens immobiliers et 3,5% en possèdent cinq ou plus (en ce compris, résidence principale, secondaire, locations etc…).

Les français ont toujours perçus l’immobilier comme une valeur refuge permettant de se constituer un patrimoine par de l’endettement dont les taux étaient encore très bas jusqu’au 2nd semestre 2022.

Face à cet engouement qui ne se dément pas, le coût fiscal de ces détentions reste le principal frein à son développement. Néanmoins, par le biais des abattements pour durée de détention, la fiscalité à la revente peut être très limitée voire nulle pour les biens détenus au-delà de 30 ans.

Dans un marché immobilier baissier, une bonne stratégie immobilière peut consister à céder tout ou partie de son patrimoine immobilier à une société contrôlée par soi-même et sa famille en anticipant la succession.

  1. Une détention immobilière très fortement taxée
  1. Une imposition lourde des revenus immobiliers

Les revenus issus des biens immobiliers détenus en direct ou au travers d’une société « transparente » (SCI soumise à l’impôt sur les revenus, SARL dite « de famille » soumise à l’impôt sur le revenu) sont les plus taxés des revenus des contribuables.

En effet, les revenus immobiliers sont taxés de la manière suivante :

  • Locations non meublées : les locations de locaux (d’habitation ou commerciaux) nus sont soumis fiscalement à la catégorie des revenus fonciers. Cette catégorie ne permet la déduction que de très peu de charges (taxes foncières, travaux, frais de gestion etc…) et le résultat des locations est taxé :


  1. à l’impôt sur le revenu (IR) au barème applicable selon les autres revenus du foyer, et au taux marginal maximal de 45%[1] ;
  2. aux prélèvements sociaux (PS) au taux forfaitaire de 17,2% ;
  3. si applicable, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au taux maximal de 4%[2].

Ainsi, les revenus fonciers sont imposés au maximal au taux global de 66,2%

  • Locations meublées : les locations de locaux (d’habitation ou commerciaux) meublés ou équipés sont soumis fiscalement à la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Il ne sera fait référence ici qu’au statut dit de loueur en meublé non professionnel (LMNP), c’est-à-dire, aux locations meublées qui (i) procurent des revenus inférieurs à 23 000 euros par an ou (ii) qui constituent moins de 50% des revenus professionnels du foyer fiscal.

Le statut des LMNP présente un traitement fiscal proche des revenus fonciers. Le statut de loueur en meublé professionnel (LMP) dispose d’un traitement fiscal propre qui sera développé dans une prochaine publication.

Le traitement selon la règle des BIC des revenus de LMNP permet, en cas d’imposition selon le régime réel d’imposition, l’amortissement du bien immobilier. Cet amortissement se calcule en fonction de chaque composant du bien immobilier. Rappelons que le montant de l’amortissement est plafonné et qu’il ne permet pas de créer du déficit.

La déduction de l’amortissement permet de baisser significativement l’assiette taxable des revenus de location et, la plupart du temps, d’abaisser le résultat à un niveau nul.

Une fois le résultat des locations meublés obtenu, l’imposition est identique à celle des revenus fonciers (soit au maximum 66,2%).

Rappel : Une SCI dont l’activité ne peut être que libérale ne peut pas donner en locations des biens meublés soumis au BIC, sauf à la soumettre à l’impôt sur les sociétés. Une solution alternative, peut-être de créer une SARL dite « de famille » qui pourra opter sur option à l’assujettissement à l’impôt sur le revenu.

En conséquence, si la location en meublée permet de limiter significativement l’assiette taxable à l’impôt sur le revenu, la fiscalité applicable reste à un niveau élevé en cas d’imposition dans les tranches supérieures du barème progressif.

Depuis la mise en place en 2018 de la « flat tax » au taux forfaitaire de 30%[3] pour les revenus financiers, l’écart entre la fiscalité des revenus du capital et des revenus immobiliers s’est creusé à un niveau historique rendant moins attractif la détention immobilière.

  1. Une imposition du patrimoine tournée exclusivement vers l’immobilier

Depuis la réforme de l’Impôt de Solidarité sur le Fortune (ISF) et le remplacement de cet impôt par l’Impôt sur la fortune immobilière (IFI) le 1er janvier 2018, l’imposition du patrimoine des contribuables a pour assiette tous les biens et droits immobiliers appartenant au contribuable. Sont visés :

  • les immeubles bâtis ;
  • les immeubles non bâtis ;
  • les droits réels immobiliers (usufruit, droit d'usage, droit du preneur d'un bail à construction notamment) ;
  • les parts ou actions des sociétés à hauteur de la fraction de leur valeur représentative de biens ou droits immobiliers.

Ainsi, tout actif financier (action, liquidité, épargne, assurance-vie…) échappe à l’IFI.

La règle d’exonération des biens professionnels permet d’exclure de l’assiette taxable, sous conditions, les biens affectés à l’exploitation d’une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.

  • Une imposition des plus-values limitée en cas de détention longue

Les biens immobiliers détenus en direct ou via une structure fiscalement « transparente » qui ne sont pas loués selon le régime de la LMP sont taxés de la matière suivante au regard des plus-values :

  1. à l’impôt sur le revenu (IR) au taux forfaitaire de 19 % ;
  2. aux prélèvements sociaux (PS) au taux forfaitaire de 17,2% ;
  3. à une surtaxe en cas de plus-value supérieure à 50 000 € au taux maximal de 6 %.

Soit un taux maximal de 42,2%

Les plus-values immobilières bénéficient (tant pour les biens loués nus que pour les biens loués en LMNP et détenus directement ou indirectement par une société « transparente ») d’abattements pour durée de détention applicables différemment à l’IR et aux PS[4].

Selon cette règle de calcul complexe, toute plus-value immobilière est exonérée au-delà de 30 ans de détention.

Ainsi, si le patrimoine immobilier est fortement taxé en cours de détention, le dispositif d’abattement pour durée de détention permet de totalement exonérer les plus-values lors de la revente au bout de 30 ans.

Ce dispositif reste très attractif en cas de détention longue des biens immobiliers et permet de contrer les effets de la prise de valeur des biens immobiliers au fil des années. Au regard des velléités de réforme de ce dispositif[5], nous incitons fortement les contribuables qui détiennent des actifs immobiliers depuis plus de 30 ans à les céder, notamment au profit d’une société qu’ils contrôlent avec leur famille.

  • Une stratégie de vente à soi-même dans un contexte de transmission patrimoniale

Une stratégie pertinente à mettre en œuvre consiste à céder les biens immobiliers détenus depuis plus de 30 ans à une société contrôlée par le contribuable et sa famille en anticipant la transmission du patrimoine.

Ce mécanisme permet de répondre à un triple objectif :

  • retirer des disponibilités issues de la cession afin de diversifier son patrimoine et profiter des taux de placement supérieurs à l’inflation
  • conserver son patrimoine immobilier
  • anticiper la transmission du patrimoine immobilier en évitant des ventes précipitées à l’ouverture de la succession

La mise en place de ce type de montage nécessite une analyse chiffrée des emplois et ressources du projet et la constitution d’un dossier de financement auprès d’une banque. Pour les plus gros patrimoines, la constitution d’une fiducie sûreté est une garantie pouvant être demandée de la part du prêteur (généralement pour les dossiers supérieurs à 5M€).

Un montage simple consiste en la création d’une société soumise à l’IS qui s’endettera auprès d’une banque afin d’acquérir les biens immobiliers. Les titres de cette société pourront être démembrés entre les parents et les enfants.

Selon la situation patrimoniale du contribuable, il pourra être envisagé la mise en place d’un usufruit temporaire au profit d’une holding familiale préexistante disposant de liquidités suffisantes pour procéder à une diversification de ses investissements. Ce type de structuration doit être mis en place avec la plus grande prudence afin d’éviter toute remise en cause de la part de l’administration fiscale sur le terrain du mini abus de droit.

Ce type d’opération doit être impérativement mis en œuvre avec son conseil et doit respecter plusieurs étapes préliminaires dont notamment :

  • la réalisation d’une expertise des biens immobiliers après d’un expert immobilier agrée ;
  • l’analyse, auprès de nous, de la situation familiale préexistante (régime matrimoniale, répartition du patrimoine etc…);
  • l’analyse, auprès de nous, des hypothèses retenues au regard de la situation fiscale du contribuable.

Il est en effet quelquefois plus sage de renoncer à une restructuration patrimoniale mal calibrée et ainsi éviter de faire prendre le moindre risque à ses héritiers. Notre présence à vos côtés pour ce type de montages est un impératif incontournable. En cas de doute, un rescrit fiscal peut permettre de sécuriser de manière incontestable l’opération.

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[1] L’article 197 du CGI fixe le barème suivant applicable à chaque part de quotient familial

DeATaux
0€11 294€0%
11 294€28 797€14%
28 797€82 341€30%
82 341€177 106€41%
177 106€-45%

[2] Pour mémoire, cette contribution est assise sur le Revenu Fiscal de référence (RFR) et prélevée au taux de 3 % pour un RFR compris entre 500.000 € et 1M € pour un couple et au taux de 4 % au‐delà d’1M € pour un couple

[3] Depuis le 1er janvier 2018, un prélèvement forfaitaire unique (PFU) dit « flat tax » s’applique aux revenus du capital. Le taux global du PFU est de 30 %, incluant 12,8 % au titre de l’impôt sur le revenu et 17,2 % au titre des prélèvements sociaux. Il s’agit d’un taux forfaitaire car ce taux ne prend pas en compte votre tranche d’imposition et votre revenu fiscal de référence.

[4] Pour l’IR, l'abattement pour durée de détention est de :

-  6 % pour chaque année de détention entre la 6ème et la 21ème ;

-  4 % à la 22ème.

Soit une exonération d’IR à partir de 22 ans de détention.

Pour les PS, l'abattement pour durée de détention est de :

-  1,65 % pour chaque année de détention entre la 6ème et la 21ème ;

-  1,60 % à la 22ème ;

-  9 % de la 23ème à la 30ème.

Soit une exonération des PS à partir de 30 ans de détention.

[5] Dans le cadre de l’examen de la loi de finances pour 2024, le Sénat avait adopté un amendement (Amendement n°I-2120 rect du 23.11.2023) visant à supprimer les abattements pour durée de détention et institué un taux forfaitaire sur les plus-values immobilières au taux de 15%.